Seul le règlement intérieur régulièrement déposé au greffe du Conseil de prud'hommes est opposable aux salariés

Etabli dans les trois mois de l’ouverture de l’entreprise,
le règlement intérieur doit être soumis à l’avis du CE (à défaut aux DP) et du
CHSCT, puis, en même temps qu’il est transmis à l’inspecteur du travail, il
doit être affiché à une place convenable dans les locaux de l’entreprise, et faire
l’objet d’un dépôt au greffe du conseil de prud’hommes (articles L. 1321-4 et
R. 1321-1 à R. 1321-5 du Code du travail).
Il s'agit de formalités
substantielles, protectrices de l'intérêt des salariés (Soc. 4 juin 1969, Bull.
Civ. n° 367) et le règlement intérieur n’entre en vigueur qu’un
mois après l’accomplissement des formalités de dépôt et de publicité (art. L.
1321-4 C. trav.).
Il s’en déduit que si ces formalités ne sont pas accomplies,
le règlement intérieur n’est pas opposable aux salariés.
Et dans ce cas, l’employeur ne peut reprocher à un salarié
un manquement aux obligations édictées par le règlement intérieur (pour l’absence
de justification de la consultation du CE et de la transmission à l’inspecteur
du travail 22 ans avant la sanction contestée, voir Soc. 9 mai 2012, n° 11-13.687, Bull. Civ. n° 134 ; pour l’absence
de consultation du CE, voir Soc. 4 juin 1969, op. cit).
Dans l’arrêt précité du 4 juin 2015, la Cour de cassation a
validé un arrêt de cour d’appel qui avait déclaré dénué de cause réelle et
sérieuse le licenciement pour faute grave d’un conducteur de machine
travaillant dans une verrerie industrielle, dont l’état « d’imprégnation alcoolique » avait
été constaté après un contrôle réalisé dans le respect des dispositions du
règlement intérieur, devant un témoin et avec l’accord du salarié qui avait
refusé la présence d’un représentant du personnel : le règlement intérieur n'avait pas été déposé au greffe du conseil de prud'hommes.
L’employeur a vainement tenté de mettre en avant le fait qu’il
est tenu d’une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de
la santé des salariés et que le salarié, qui était habilité à manipuler et
transporter du verre chauffé à 1 500°c, avait pris son poste en étant
alcoolisé, que des bouteilles d’alcool vidées avaient été trouvées dans son
casier et qu’il avait ainsi mis en danger les autres salariés.
Pour mémoire, le contrôle
de l’alcoolémie par alcootest n’est possible que s’il ne porte atteinte à
aucune liberté fondamentale, ce qui est le cas (= ce qui n’est le cas que) lorsque
le recours au contrôle d’alcoolémie permettant de constater l'état
d'ébriété d'un salarié au travail, dès lors que eu égard à la nature des
fonctions exercées, un tel état est de nature à exposer les personnes ou les
biens à un danger et que les modalités de ce contrôle, prévues au règlement
intérieur, en permettent la contestation, peu important que, pour des raisons
techniques, il s'effectue hors de l'entreprise (Soc. 31 mars 2015, n°
13-25.436, à paraître au Bulletin).
A noter qu’en revanche, la carence
de l’employeur dans l’accomplissement de la formalité de communication du
règlement intérieur à l’inspection du travail ne prive pas le salarié de la
possibilité de se prévaloir dudit règlement (Soc. 28 mars 2000, n° 97-43.411,
Bull. Civ. n° 136, p. 105 ; dans cette affaire, le règlement devait probablement avoir été affiché
dans l’entreprise, ce qui justifiait que le salarié pensait pouvoir s’en
prévaloir, alors que l’employeur soutenait que ce n’était pas le cas dans la mesure
où le règlement n’avait pas été transmis à l’inspecteur…).
C’est logique, puisque c'est à l’employeur
de procéder aux publications, dépôts et transmission à l’inspecteur du
travail : s’il ne le fait pas, il supporte intégralement le risque de sa carence.
CONCLUSION : vérifiez si vous avez procédé à ces dépôts, publication et transmission et, surtout, vérifiez si vous en avez conservé les preuves (le greffe ne fournira pas la preuve et dans un procès, tout est question de preuve...).
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