
Pour
comprendre la logique de la jurisprudence de la Cour de cassation en matière de
contrôle et surveillance du salarié, il faut repartir du lien de subordination, qui
caractérise le contrat de travail et qui donne à l’employeur le pouvoir de
direction et donc celui de contrôler et de surveiller l’activité du salarié
durant le temps de travail.
Mais
le salarié ne louant que sa force de travail, et uniquement pendant le temps du
travail, ce droit de contrôle et de surveillance et les preuves recueillies
lors de son exercice doivent respecter sa vie privée et familiale, son domicile
et sa correspondance (mails, sms, lettres, revues..).
Une question importante
se pose alors : le salarié doit-il être informé de la possibilité d’un
contrôle ?
Pour comprendre
la logique de la jurisprudence, il faut cette fois partir du principe de
loyauté dans l’exécution du contrat de travail, qui s’impose au salarié comme à
l’employeur.
La loyauté impose
une exigence de transparence du contrôle et de la surveillance du salarié et exclut
la mise en œuvre de stratagèmes.
Dès
lors, schématiquement (tout est question de fait et donc chaque affaire est
spécifique), la Cour de cassation a précisé que :
- le contrôle doit être fait au temps et au lieu de travail ;
- le contrôle ne doit pas déborder sur la vie privée : par ex. sont illicites les preuves recueillies au cours de filatures jusqu’au domicile ou dans le cadre de tout événement ou fait de nature privée (même au temps du travail, par ex. un rdv privé, ou pendant les temps de pause, aux toilettes…), les écoutes téléphoniques, l’utilisation de photos ou messages intimes ou privés même non conservés dans des fichiers identifiés comme « personnel » ;
- mais l’emploi de procédés de surveillance clandestin est illicite ;
- la collecte d’informations concernant personnellement les salariés grâce à un « dispositif de contrôle » (c’est-à-dire destiné à les surveiller de façon permanente) doit être porté à leur connaissance, à celle du comité d’entreprise et le cas échéant de la CNIL ;
- sont considérés comme des « dispositifs de contrôle » : les filatures ou enquêtes réalisées par des tiers (détectives privés), les systèmes de géolocalisation pour assurer le contrôle de la durée du travail, la vidéosurveillance ;
- ne sont pas considérés comme des « dispositifs de contrôle » ou un « procédé de surveillance » et sont donc licites les preuves recueillies sans autorisation préalable du juge et sans information préalable du salarié, par un service interne de l’entreprise (puisque ce dernier est organisé par l’employeur, détenteur du pouvoir de contrôle) : lors du contrôle ponctuel de factures de téléphone, des connexions internet ou lors de la lecture hors de la présence du salarié des fichiers, mails ou sms envoyés ou reçus sur l’outil informatique mis à disposition par l’entreprise et non identifiés comme « personnels », ou encore lors de filatures effectuées par d’autres salariés de l’entreprise, y compris jusque dans des lieux publics (par ex. magasins) dans lesquels les salariés se rendent pendant le temps de travail (au lieu de travailler..) ;
- l’ouverture des armoires, l’écoute d’un dictaphone doit se faire en présence du salarié ;
- l’ouverture des sacs se fait après avoir informé le salarié qu’il peut s’y opposer et d'exiger la présence d'un témoin (sauf circonstances exceptionnelles telles que alertes à la bombe).
Conclusion :
c’est subtil ;) et la plus grande prudence s’impose avant de prononcer une
sanction disciplinaire sur la base de preuves recueillies lors de l’exercice du
pouvoir de contrôle et de surveillance !
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